Retour Articles Vies de famille

Assistante maternelle, un métier qui a du sens

Si la profession ne nécessite pas un parcours académique long ou complexe, devenir assistante maternelle ne s’improvise pas et suppose technicité et humanisme. La preuve avec Catherine, assistante maternelle dans les Yvelines.

Quel est votre parcours professionnel ?

Catherine. Après avoir démarré une fac de Lettres classiques à la Sorbonne, j’ai dû écourter mes études supérieures pour aller travailler. À tout juste 20 ans, j’ai débuté une carrière dans la comptabilité. Puis un jour, enceinte de mon deuxième enfant, mon entreprise a déménagé, ce qui rallongeait considérablement mon temps de transport. Après mon , j’ai négocié un licenciement à l’amiable.

Pourquoi ce choix de devenir assistante maternelle ?

C. J’ai beaucoup réfléchi au meilleur moyen de continuer à travailler tout en restant auprès de mes enfants. L’idée de devenir assistante maternelle m’est venue assez vite. En passant au centre de Protection Maternelle et Infantile (PMI) de mon territoire, j’ai pu obtenir tous les renseignements nécessaires pour alimenter ma réflexion. Résultat : lorsque j’ai été licenciée, j’avais déjà toutes les clés en main pour me lancer en indépendante.

Comment avez-vous été formée ?

C. Pour obtenir mon agrément en 2001, j’ai dû effectuer une formation initiale obligatoire de 60 heures qui couvrait les connaissances de base, telles que les besoins de l’enfant, l’hygiène et la sécurité au domicile, entre autres. Aujourd’hui, cette formation est passée à 120 heures. De mon côté, j’ai pris l’initiative de me former régulièrement. J’ai acquis des compétences supplémentaires : gestes de premiers secours, diversification alimentaire, bientraitance, communication non violente, activités d’éveil avec de la récup’… Autant d’atouts que je valorise auprès des parents qui m’emploient aujourd’hui.

Avez-vous une journée-type avec les petits ?

C. Le matin, je prévois toujours un temps d’accueil avec l’enfant et son parent. Puis je propose des jeux libres avant d’entamer la journée avec la chanson du bonjour. Ensuite, on part faire une promenade d’une heure environ, quelle que soit la météo (ce qui suppose d’être bien équipé). S’ensuit le temps du repas, la lecture, puis la sieste. Après le goûter, on repasse aux jeux libres ou dirigés, et on repart pour une courte promenade ou des jeux en extérieur si nécessaire.

Quels sont les avantages et les inconvénients de votre métier ?

C. Le principal avantage, c’est l’autonomie. Cela suppose d’être organisée, observatrice, inventive, savoir gérer la spontanéité des tout-petits ou canaliser leur énergie. L’inconvénient, c’est l’envahissement (consenti, bien sûr) de la sphère professionnelle dans la sphère privée. On doit entièrement sécuriser notre lieu de vie pour pouvoir accueillir les enfants, ce qui suppose des aménagements particuliers, comme poser une barrière si l’on a un escalier, s’équiper avec du matériel homologué… On subit aussi les contraintes des parents employeurs qui peuvent être retardés, ce qui empiète sur notre temps familial. Enfin, même si l’on est protégé par des droits, nous sommes toujours incertaines de retrouver un autre enfant en accueil après une rupture de contrat (départ anticipé ou entrée à l’école).

Vous semblez être sensible à l’éveil (motricité, émotions, langage…) des enfants que vous accueillez.

C. Je fais un métier « de l’humain ». Au quotidien, j’apprends à connaître les enfants que j’accueille, pour répondre au mieux à leurs besoins, adopter la méthode la plus appropriée pour les accompagner dans leurs apprentissages. J’observe beaucoup leur comportement, leur manière de s’exprimer, que ce soit dans le verbal ou le non verbal. J’aime communiquer avec eux, pour éveiller leur curiosité, pour les rassurer lorsque c’est nécessaire, leur proposer une journée agréable ensemble. Ce sont la psychologie et les neurosciences qui m’ont éveillée vers cette approche, notamment les ouvrages de Céline Alvarez, d’Isabelle Filliozat ou encore de Marshall Rosenberg.

Quels sont vos attentes du métier pour l’avenir ?

C. J’aimerais voir se généraliser les groupes de parole neutres, où l’on peut s’exprimer librement sur les difficultés que l’on rencontre au quotidien et lutter contre l’isolement. Aujourd’hui, ces réunions existent, mais ne sont pas systématisées partout, et sont souvent animées par les responsables du relais intercommunal des assistantes maternelles (RIAM) ou de la PMI, ceux-là même qui octroient les agréments !
Je rêve aussi d’avoir une relation partenaire avec la PMI et les puéricultrices de notre secteur qui se déplacent à notre domicile pour vérifier les conditions de notre exercice. Depuis 2001, je n’ai eu que deux visites surprises. La plupart du temps, quand une puéricultrice se déplace, c’est pour le renouvellement de notre agrément tous les 5 ans. C’est insuffisant !

D’une manière globale, quel sens donnez-vous à votre profession ?

C. C’est un métier que j’ai su rendre intéressant de mon point de vue, car je suis très curieuse de nature. J’aime comprendre le fonctionnement de l’humain et je m’y intéresse de près. Je me documente, je lis beaucoup, j’observe, je communique, je m’adapte. Je travaille aussi main dans la main avec les parents employeurs. Je savoure également ma chance d’exercer une profession indépendante, que je façonne à ma manière .

Propos recueillis par Linda Taormina