Une guerrière. Voilà comment Manon Lefort se décrit sur Instagram. Sur les réseaux sociaux, cette jeune Picarde de 25 ans est plus connue sous le pseudo « Amput_girl ». « Un nom de super-héroïne », explique-t-elle, qui lui donne la force de briser les tabous sur les personnes amputées.
Atteinte de la maladie de Crohn, une maladie inflammatoire chronique du système digestif, Manon Lefort a vu sa vie basculer en 2016. Une occlusion intestinale mal prise en charge déclenche une septicémie. A 20 ans, elle se fait amputer de la jambe droite.
« Après mon réveil du coma, je suis tombée dans une grave dépression, se souvient-elle. Quand j’ai sorti la tête de l’eau, j’ai essayé d’écrire pour me faire du bien. » Quatre ans plus tard, elle comptabilise plus de 29 000 abonnés sur Instagram, 236 000 sur Tik Tok et plusieurs millions de vues.
Une prothèse à paillettes
Sur les réseaux sociaux, elle parle sans détour de son amputation, de sa fatigue, de ses séjours à l’hôpital. Mais surtout, elle met régulièrement en scène son moignon, surnommé affectueusement « Monsieur Patate »… et tant pis si cela dérange !
« J’ai un humour très noir et décalé, et souvent les gens dans la vraie vie ou sur les réseaux sont beaucoup plus mal à l’aise que moi », s’amuse-t-elle. Son dernier fait d’armes ? Obtenir du chanteur Keen’V qu’il chante une berceuse à sa jambe amputée.
« A mes débuts, je postais des photos de mon quotidien, mais je ne montrais pas ma jambe. Je ne voulais pas que les gens voient ce corps qui avait changé. » Puis c’est le déclic : elle abandonne sa prothèse classique pour un modèle... à paillettes. Une prothèse qui lui ressemble, pour montrer sa différence de façon éclatante.
« Petit à petit, j’ai commencé à montrer ma prothèse et mon moignon sur les réseaux sociaux. Ça peut choquer, ce sont des choses que la société montre assez peu, donc beaucoup de gens ne savent pas à quoi ça ressemble ! » Les retours positifs des internautes l’aident à retrouver confiance en elle et l’incitent à continuer.
Dédramatiser le handicap
Aujourd'hui, Manon Lefort publie une dizaine de vidéos par jour, dans lesquelles elle partage sans fard sa bonne humeur, mais aussi ses coups de blues. Le but : dédramatiser le handicap et montrer qu’on peut se relever malgré les épreuves. « Je ne suis pas là pour donner une image parfaite. Même si mon côté positif ressort énormément, il y a aussi des moments plus sombres. J’ai envie de montrer cette réalité. »
Pour expliquer son handicap, la jeune femme interagit régulièrement avec ses abonnés. Les questions qui reviennent le plus ? « Comment je fais pour mettre ma prothèse, pour rester positive, l’acceptation du handicap dans mon couple ? Mais on me pose aussi beaucoup de questions sur mes maladies. » Des pathologies multiples, contre lesquelles elle se bat au quotidien, comme la maladie de Crohn et la spondylarthrite ankylosante, une inflammation chronique des articulations.
Manon Lefort l’assure : « 98 % des commentaires que je reçois sont positifs. » Avec quelques exceptions : « Quand je montre mon moignon sur Tik Tok, je suis souvent signalée pour nudité ou sexualisation, alors que ce n’est qu’un morceau de chair ! Résultat, mon compte se retrouve régulièrement bloqué pendant quelques jours. » Mais il en faudra plus pour l’arrêter, promet-elle : « Une guerrière ne baisse jamais les armes, tant qu’elle est en vie ! »
Crédit photo : Thomas 77
Pour aller plus loin
Le compte Tik Tok de Manon Lefort
Le dossier « Maladie de Crohn : définition et facteurs favorisants » sur le site de l’Assurance maladie
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